À la clinique, quand la contraction arrivait, la douleur me semblait insurmontable... Et puis j'ai trouvé, en faisant de grands pas, soutenue par mon mari, à peine quelques pas et la contraction était passée, la douleur oubliée. Plusieurs heures se sont écoulées ainsi sans que j'aie le sentiment de souffrir le martyre ou de vivre un calvaire. Mes souffrances lors de ma première grossesse ont été dues à des pratiques médicales usuelles et non à l'accouchement en lui-même. Touchers vaginaux douloureux, angoisse d'un déclenchement, douleurs post-épisiotomie et sonde urinaire, déception que mon bébé ne tète pas immédiatement (conséquence de l'aspiration), forte inquiétude au milieu de la nuit lorsque mon bébé, mon premier enfant, né depuis quelques heures, s'est mis à vomir une substance noire (du sang ?, autre conséquence de l'aspiration)... et surtout : hémorragie. Non, je n'ai pas eu mal, la péridurale était "parfaite". Le mot "hémorragie" n'a seulement jamais été prononcé. Je ne l'ai su que beaucoup plus tard, en lisant mon dossier médical. J'ai longtemps cru que la fatigue que je ressentais été simplement due au fait d'avoir accouché, et d'avoir un bébé. Le soir, épuisée, je culpabilisais de ne plus avoir la force de sourire à mon bébé. Je n'avais plus la capacité de formuler des explications simples, je ne trouvais plus mes mots pour parler. Et puis il y a eu mon deuxième accouchement, à la maison, sans un regret et sans péridurale. Avant personne ne m'avait vraiment répondu à la question "Est-ce que ça fait mal ?" Je peux, comme tout le monde, vous dire que c'est difficile de répondre, que la douleur, c'est subjectif... Mais je vais essayer d'être un peu plus précise que ça. Je ne sais pas s'il est juste de dire que la douleur est quelque chose de subjectif, en revanche, ce qui est sûr, c'est que la douleur est d'autant plus supportable que l'on est dans un environnement qui nous convient. C'est un peu comme si, il ne fallait absolument pas être dérangée, ou perturbée par quoi que ce soit. Il ne faut avoir à s'occuper que d'une seule chose : accoucher. Il ne faut avoir ni trop froid, ni trop chaud, ni besoin de répondre à une question. Dans mon cas, j'avais seulement besoin qu'on me donne à boire. À partir du moment où l'on se trouve dans un environnement rassurant, que ce soit à la clinique ou à la maison, notre corps va se mettre à secréter des endorphines pour nous permettre de supporter la douleur. Ce phénomène ne se produit pas, ou moins bien, lorsqu'on est stressée ou dérangée (par exemple lorsqu'on souhaite vous examiner pendant le travail). Ceci explique que la sensation de douleur soit alors amplifiée. Pour finir, je crois que le meilleur exemple que j'ai trouvé pour transcrire la douleur de l'accouchement est celui d'une longue randonnée en montagne : parfois on a mal aux jambes, la pente est trop raide, on trouve le chemin trop long... Mais lorsqu'on arrive enfin au sommet : le spectacle est à vous couper le souffle. Et pour rien au monde vous n'auriez voulu qu'on vous anesthésie les jambes avant de monter !